« Depuis l’adoption du projet de loi C-7, les Québécois n’ont plus le même accès à l’AMM que les autres citoyens du pays. C’est la clause dérogatoire à l’envers : les patients québécois doivent souffrir davantage aux derniers moments de leur vie que les autres Canadiens. »
C’est sur ce ton alarmiste que le Collège des médecins du Québec, dans un mémoire déposé en mai 2021 à la Commission spéciale sur l’évolution de la Loi concernant les soins de fin de vie (LCSFV), implore le gouvernement québécois de procéder le plus vite possible à l’harmonisation de la LCSFV avec la l
oi canadienne modifiée ce printemps. Cette position est d’ailleurs appuyée par l’Ordre des psychologues du Québec, dans son mémoire déposé à la même commission en août dernier.
Le problème vient du fait que le gouvernement du Canada a modifié le Code criminel en matière d’aide médicale à mourir le 17 mars 2021, modification qui a pour effet de retirer l’obligation d’un deuxième consentement au moment de l’administration de l’aide médicale à mourir (AMM). (Texte de la Loi C-7 ici)
Cette situation affecte entre autres les personnes qui voient leurs aptitudes diminuer sous l’effet de la maladie ou des traitements. Ne pouvant renoncer au second et dernier consentement par le biais d’une procédure formelle, comme tous les autres Canadiens depuis l’adoption du projet de loi C-7, « ces Québécois se retrouvent dans une situation où l’on nie leur volonté d’autodétermination, ce qui ne leur laisse que des options inacceptables : prolongation de l’agonie, souffrance exacerbée par le refus de la médication analgésique afin d’éviter de perdre leur capacité de consentir, ou recours à la sédation palliative continue à défaut d’autre choix », dénonce le Collège. « Pire encore, continue le mémoire, certains patients devront traverser l’Outaouais ou longer la Matapédia pour obtenir dans une autre province les soins réclamés, en tout respect de leur choix et du rétablissement de leur droit. Cette situation n’a aucun sens. »
Rappelant que ce sont les médecins qui « portent la lourde responsabilité d’administrer ce soin », le Collège constate qu’ils « sont pris dans un étau. Certains ont carrément cessé de pratiquer ce soin, par crainte de représailles. D’autres s’en désistent graduellement ». C’est que des fonctionnaires du ministère de la Santé et des Services sociaux, selon le mémoire, « exigent actuellement des médecins du Québec et de leur ordre professionnel qu’ils ne respectent que la loi québécoise, sous peine de poursuites ou de plaintes auprès de l’Office des professions du Québec ».
Le problème a cependant été partiellement réglé quelques jours après le dépôt du mémoire du Collège des médecins par une modification apportée le 10 juin 2021 à l’article 29 de la loi. En effet, le médecin peut désormais administrer l’AMM même si la personne est devenue inapte à consentir après avoir formulé sa demande, mais à la condition que celle-ci ait été enregistrée dans les 90 jours précédant la date de l’administration de l’AMM. Pourquoi 90 jours ? Je n’ai pas trouvé de réponse à ce jour.