Ce
livre est bouleversant parce qu’il ose faire apparaître le jeu de nos batailles les plus profondes, de nos absurdités et du mystère de nos vies. Le blond et le noir coexistent ici dans une inversion symbolique faisant ressortir ici la double force du féminin et du masculin tout comme de l’ombre et de la lumière, de l’eau et du feu… et que dire de tous ces rituels où les nombres, les odeurs et les mouvements martèlent les épousailles profondes. Qui en comprendra le sens, sinon ceux et celles qui les vivent au jour le jour… faisant la guerre jusqu’à l’Ultime rien en souhaitant de toutes leurs forces la paix. (Jean-Marie Berlinguette)
À genoux lecteurs ! Vous ne vous en sortirez pas vivants. Ne vous laissez pas prendre. Si vous lisez tous ces chapitres, vous ne sortirez pas vivants des derniers chapitres. Vous haïrez l’auteur. Diaboliquement inspiré. À la fois Gaudiose et son père, Jeanne et Delphie, Ramon et Jacques, Amélie et Louise. Troublant être humain qui s’est déshabillé l’âme en quelques centaines de pages, après des années d’écriture, avec tous les soubresauts que je ne connais pas, mais qui n’ont pas dû manquer, découragements et autres. J’étais plus disposé à la cajolerie caressant l’intellect et l’imaginaire révolutionnaire. Mais il nous a servi le plat épicé de la vie. Le piment fort nommé Jacques dans « L’Enfant-de-guerre » n’a pas fini de m’apparaître un peu partout pour le temps qu’il me reste à tourner en rond sur cette terre. (Jean-Pierre Lambert)
L’Enfant-de-guerre m’a intriguée jusqu’à la fin. Au départ, la grosseur du livre me rebutait un peu. Mais les premières pages m’ont fascinée, moi qui connais si peu l’enrôlement des jeunes Québécois d’une époque pas si lointaine… L’histoire de ce jeune garçon violent m’a particulièrement fascinée. C’est un livre touffu. Bravo pour le souffle ! (Claude Lebrun)
Ouf ! J’ai réussi la lecture de ce roman qui est devenu pour moi, pendant les quelques semaines à mon chevet, un sujet de réflexions et de confrontations. Il m’a transportée dans un univers rarement, sinon jamais, abordé. À la seule description du générique, je n’avais pas envie de connaître ce garçon imbibé de haine et de vengeance. Et, me suis-je dit, pourquoi pas ? L’auteur a réussi à m’amener dans cet univers de « haut niveau » qui a permis à nos héros et héroïnes de transcender leur vécu pour leur permettre de poursuivre avec sérénité leur choix de chemin. Ce qui m’a aussi déroutée, c’est que le récit se déroule à une époque que j’ai bien connue et qui ne laissait aucune place à cette transcendance dont sont favorisés les délicieux Gaudiose et Delphina. Ce récit se lit bien, il captive à vrai dire. Somme toute, j’en ressors ébranlée et en même temps charmée par le niveau de compréhension introduit par l’auteur. Je le recommanderais volontiers. Il y a là matière à une réflexion que je trouve pertinente. (Suzanne Hélène Lemieux)
Dire que ce roman m’a plu est faible : il m’a transportée. C’est un roman d’Amour, un roman d’Initiation, un roman de Hiérophanie, un roman de Vie. J’y ai retrouvé et ce n’est pas pour m’étonner des temps de « passages », des temps héroïques, des temps de grâce. Et même des « points d’assemblages » avec ma propre vie. Merci ! (Joëlle Maugery)
J’ai très vite été happée par cette histoire de plus de cinq cents pages, dévorées/dégustées en trois jours. Lorsque Gaudiose quitte sa famille et part à la guerre, la perspective historique est fort bien documentée. J’ai toujours aimé apprendre sur l’histoire en lisant un roman et je suis encore plus touchée lorsqu’il s’agit de la nôtre. Les rituels amérindiens, qui sont si bien liés au récit, mettent en lumière un bout de notre histoire gardée dans l’ombre et trop souvent occultée. J’ai été très touchée par la sensibilité de Gaudiose et la force de Delphina et par l’union de leurs forces et leurs ombres respectives. Cependant, j’ai eu parfois de la difficulté à saisir Jeanne d’Arc et ses envolées, un peu trop lyriques. Lorsque je lis un bon roman, je me demande comment l’auteur peut avoir une histoire aussi dense et autant de souffle pour la déployer. C’est le cas ici. (Manon Rousseau)
Que d’émotions, vos mots parlent et touchent l’âme.
Je suis infirmière… mon fils est militaire…
Vous avez touché à ce qui me passionne… l’amour, la mort, le spirituel.
La guerre en dedans de soi. Je suis dans une réflexion. De quoi est-on conscient réellement ? (L. D’A)
L’histoire se passe dans mon petit coin de pays. Grosse-Île, Berthier, etc…. Je me suis laissé charmer par l’histoire. Ce que j’ai compris dans tout cela c’est qu’un jour nous venons au monde et nous sommes prêts à repartir nous avons doublement besoin de ceux avec qui nous avons partagé nos joies, nos peines et notre vie. Le point qui m’a le plus touchée, c’est lorsque les filles de la mère lui donnent un bain, prennent du temps pour elle et seulement elle. Malgré les déchirements, elles ont su garder de l’amour pour celle qui les a portées. (A. M.)
La construction de ce roman et l’omniprésence du « Deus ex machina » me rappellent David Copperfield de Dickens et surtout L’Élu de Thomas Mann. Gabrielle Roy n’est pas non plus étrangère à ce récit. Raymond Paradis me fait penser à un certain étudiant de la faculté qui, la dernière fois que je l’ai vu, travaillait à Radio Basse-Ville, œuvrant dans et pour la pauvreté. (M. St-C)
Voici mes commentaires sur L’enfant-de-guerre. D’abord, il me semble y trouver la plupart de thèmes qui, vingt ans plus tard, continuent de t’animer, Marcel, dans la recherche de sens et le partage que tu souhaites en faire dans notre devenir collectif, ce qui me semble d’une remarquable constance.
Personnellement, en tant qu’athée, je ne suis évidemment pas rejoint par l’immense place que Gaudiose et Amélie donnent à sainte Jeanne d’Arc comme support (pas toujours au rendez-vous) dans leurs débats acharnés pour comprendre et composer avec les questionnements existentiels qui les confrontent. Heureusement, comme toute œuvre artistique, ton roman permet une lecture qui s’y glisse à un autre niveau. Il me semble que ton récit qui s’échelonne sur plus de quarante ans peut se lire comme une allégorie de notre histoire québécoise, collective cette fois, de la même époque. Cette intuition ne m’est venue qu’assez tard dans ma lecture, à mi-chemin du texte peut-être, et il faudrait se remettre à une relecture qui prêterait sans doute à de multiples débats pour développer cette trame implicite.
À mes yeux, la famille Beauchemin illustre, d’une certaine manière, les profondes difficultés que nous avons de trouver une voie pour sortir du cul-de-sac dans lequel nous ont conduit les référendums, ces derniers ayant été vécus évidemment dans la suite de l’histoire partagée avec les Beauchemin. Comme dans cette famille, nous restons lestés, presque paralysés par les choix que nous avons faits, comme la mère qui a dû être euthanasiée pour la sortir des conditionnements qui ont structuré sa vie, un acte de libération payé cher par son auteur dans ton roman, et qui nous est rendu inaccessible dans notre société par une culpabilité rampante d’être ce que nous sommes, ce qui mine ce qui pourrait en ressortir au plan socio-politique et que nous n’avons pas pu actualiser lors de ces moments historiques.
Parmi les ponts qui pourraient être explorés entre les espoirs et les drames de la famille Beauchemin, leurs accomplissements et leurs échecs, et ceux de notre nation, il y aurait peut-être ceux-ci qui ont ajouté du sens à ma lecture: la Foi, la religion, les institutions quasi immuables (l’Église, la Justice) qui enraient et condamnent les mouvements d’émancipation; le « trouble » apporté par « l’Étranger » que nous n’arrivons pas à intégrer; les conflits et divisions internes engendrés par les difficultés de communication, dans les familles et autres groupes intimes; les violences subies ou imposées, quelquefois dans les meilleures intentions, éducationnelles entre autres; la pauvreté vécue comme une vertu plutôt que d’avoir l’audace d’en combattre les racines (les Ramon sont toujours raillés et leurs théories soupçonnées d’être mortifères, comme autant de « Cheval de Troie »); le partage d’un espoir et d’un projet libérateur qui s’enlise dans une attente infinie de la réalisation d’une promesse extravagante (le nationalisme aveugle qui attend le Grand Soir sans aucune concession, la religion sclérosée qui dicte les normes sans les adapter à l’évolution culturelle ni à ce qu’est un être humain, et la Foi du charbonnier qui s’en remet aveuglément à la bienveillance du Père); le morcellement de la société par l’individualisme capitaliste qui annule la puissance du message de toutes les saintes Jeanne d’Arc de ce monde : « Ce n’est pas moi la cause de tout cela » […] Seule, je ne peux arrêter ce qui est commencé » […] « Ensemble, nous pouvons, à la condition d’avoir la foi. »
Avec l’immense imagination dont témoigne ton roman, tu pourrais sans doute exploiter bien d’autres liens. Tu es sans doute ailleurs. J’ai quand même voulu partager ces réflexions avec toi.